MARIE BAERTZ : Déi Rout Léiwinn

21.10.25

Marie Baertz est sans aucun doute la golfeuse de l’année au Luxembourg ! Championne nationale, victorieuse avec l’équipe du Golf-Club Grand-Ducal aux Interclubs, victorieuse avec l’équipe du Luxembourg au European Ladies’ Team Shield Championship et leader naturelle du golf féminin luxembourgeois, la jeune femme est aussi membre de l’équipe universitaire de la Texas A&M University – Commerce où elle poursuit sa troisième année de bachelor en ingénierie. Et comme un signe du destin, l’animal totem de son université est… le lion.  Un joli clin d’œil au Luxembourg de la part d’une jeune femme de 22 ans qui ne manque pas de mordant !

B : Comment te sens-tu de l’autre côté de l’Atlantique ? As-tu le moral ? Le Luxembourg ne te manque pas trop ?  

M.B. : Je me sens bien. C’est toujours 50/50, en fait. J’ai toujours hâte de commencer ma saison ici et en même temps, ma famille et mes amis me manquent. C’était plus dur les premières années car quand on arrive ici, on se demande comment ça fonctionne.  Quand je vois mes deux nouvelles team-mates cette année, j’essaie de faire au mieux pour qu’elles se sentent tout de suite à l’aise car je suis passée par là.  J’ai eu la chance d’arriver aux Etats-Unis à 20 ans.  C’est plus simple qu’à 18 !

B : Comment se passent tes études ?  

M.B. : Comme tous les bachelors américains, mes études dureront quatre ans. J’ai choisi une « major » en Construction Engineering et une « minor » en mathématiques car j’avais déjà quelques crédits de mon année à Zurich. Côté golf, nous avons les entrainements physiques, c’est-à-dire la musculation, le mardi et le jeudi à 6h50.  Nous avons nos cours de bachelor tous les matins et nos entrainements de golf tous les après-midis, sauf le dimanche.  Lorsqu’il y a des tournois, ils ont en général lieu du dimanche au mardi.  On commence par la reconnaissance du parcours le dimanche puis on enchaine avec 36 trous le lundi et 18 trous le mardi. Il y a cinq ou six tournois en automne et cinq ou six tournois au printemps.

B : Quels sont les objectifs de la saison ?

M.B. Nous jouons la « Conference » à la fin du mois d’avril. Il s’agit d’un tournoi interuniversitaire et intersports.  Si nous finissons premiers de ce tournoi, nous jouons au niveau « Regional » à la fin du mois de mai, puis au niveau « National ».  L’année dernière, nous avons fini deuxièmes à la Conference, ce qui était plutôt bien et à titre personnel, j’ai également fini deuxième.  Ce tournoi est le gros objectif de cette année.  Mon université est en première division et n’a jamais pu jouer le niveau régional pour des questions administratives et financières.  Mais cette année, c’est vraiment possible de viser plus haut.

B : Ton équipe est-elle principalement composée d’Américaines ?

M.B. : Non, pas du tout.  Zéro Américaine cette année ! Nous avons une Argentine, une Bolivienne, une Suédoise, deux Allemandes et moi.

B. : D’après toi, qu’est-ce qui explique que les bons golfeurs et golfeuses européens et européennes partent aux États-Unis ? Pourquoi n’arrive-t-on pas à les garder en Europe ?
M.B. : Personnellement, j’ai commencé mes études à Zurich. Je n’avais plus le temps de jouer golf parce que notre système n’est pas fait pour le sport. Ici, j’ai toujours un plan de ce que je dois faire. Nous avons des conseillers qui préparent notre planning et organisent notre temps. Je n’ai pas de préoccupations de ce côté-là. Tout est pensé pour nous, pour nous laisser le temps de nous entrainer. C’est très pratique. En plus, on peut s’entrainer intensivement toute l’année puisque la météo est toujours bonne ! Pas besoin de golf indoor ou de simulateur.  Grâce à cette bonne organisation, nous nous entrainons vraiment beaucoup. Les Américains disent que la technique importe peu car nous sommes déjà tous de bons athlètes mais ils pensent que si on s’entraîne plus, on devient un meilleur joueur. Le but est de devenir plus fort, d’avoir plus de dynamique, de travailler le physique par la musculation. Et c’est vrai que si l’on vient étudier ici, en principe, on a déjà un bon swing. Ici, c’est la performance qui compte.  A l’entrainement, on fait beaucoup de drills, d’exercices répétitifs.  Et on ne rentre pas tant qu’on n’a pas réussi tel ou tel exercice. Leur but est aussi de mettre la pression à l’entrainement car si on gère la pression à l’entrainement, on la gèrera en compétition.

B : As-tu eu le choix de ton université ?

M.B. : Le choix était assez limité car pour les bachelors scientifiques, seulement 16 universités correspondaient à ce que je cherchais. Et il fallait encore trouver une équipe de golf et que cette équipe soit à peu près de mon niveau…  Je crois que j’ai fait le bon choix.

B. : Tu aimes le Texas et ta vie à Dallas ?
M.B. : Honnêtement, j’aime bien. C’est très différent de l’Europe ! J’ai des chocs culturels tous les jours. Mais c’est vraiment bien. Il fait chaud, on peut tout faire. Et maintenant, j’ai une voiture ici. C’est très pratique, notamment pour aller voir les matches de basket des Mavericks qui jouent en NBA ! Mais honnêtement, on n’a pas trop le temps de faire autre chose que l’école et le sport…

B. : Tu parlais de choc culturel. As-tu un exemple ?
M.B. : La nourriture ! Heureusement que nous avons une bonne cantine car je n’aime qu’un seul restaurant.  Tous les autres ne sont pas aux goûts des Européens.

B.: Qu’est-ce qui a été le plus difficile quand tu es arrivée aux Etats-Unis ?

M.B. : Je pense que le plus difficile est vraiment de s’habituer à s’entraîner autant. En plus, ici, il fait chaud et nous portons toujours notre sac. Et puis les journées sont très longues, avec la muscu, puis les cours, puis le parcours et les trajets université/golf qui prennent une heure…

B :  Et qu’est-ce qui a été plus facile que prévu quand tu es arrivée aux États-Unis ?
M.B. : De me faire des amis ! Il y a beaucoup d’étudiants internationaux. Par exemple, ma room-mate vient d’Allemagne. J’ai tout de suite rencontré beaucoup de gens super gentils.  En fait, je trouve que tout le monde est super gentil. Les professeurs, par exemple, sont compréhensifs si je ne peux pas venir au cours à cause des tournois. Ils donnent les cours en avance, envoient des vidéos ou nous aident.  Il n’y a pas beaucoup d’athlètes dans les études d’ingénieur, seulement un joueur de football américain et une footballeuse. Donc heureusement que les professeurs s’adaptent. Et quand je suis arrivée, l’une de mes team-mates faisait les mêmes études que moi. Elle m’a donné de précieux conseils pour bien m’organiser.

 

B. : Parlons de l’équipe nationale luxembourgeoise et surtout de cette magnifique victoire au European Ladies’ Team Shield Championship cet été ! Peux-tu nous expliquer ce qu’est ce tournoi organisé par l’EGA (European Golf Association) ?

M.B.: Le Team Shield est une sorte de deuxième division pour les pays européens qui comptent moins de golfeurs. Il y a des pays qui ont vraiment de bons joueurs, mais qui n’en ont pas suffisamment pour la première division.  Pour le Team Shield, le pays peut inscrire une équipe de seulement quatre joueurs alors qu’en Division 1, il faut six joueurs.

B. : Qu’est-ce qui a fait la différence pour le Luxembourg cette année ?

M.B. : C’était ma cinquième participation et c’était vraiment cool car on avait vraiment une bonne équipe. Toutes les quatre, nous jouons dans le même club en Allemagne en 2ème Bundesliga. Et vraiment c’était trop cool. On se comprend vraiment très bien et je dirais que c’est vraiment ça qui nous a donné la confiance. Je dirais aussi qu’avant, on avait moins d’expérience. Et puis Lisa et moi sommes aux États-Unis où nous nous entraînons beaucoup plus. Nous ne sommes pas allées au Team Shield en pensant que nous allions gagner mais Douglas, notre coach, a fait un travail incroyable.  Il nous donne toujours de la confiance. Il nous dit toujours qu’on peut le faire, il nous dit toujours « vous pouvez gagner, vous pouvez gagner, vous pouvez gagner ». Nous, les filles, nous pensons toujours « on ne peut pas, non on ne peut pas ».  C’est vraiment lui qui nous qui nous a donné confiance et je trouve que c’est vraiment un très bon coach ! Techniquement aussi d’ailleurs, il m’a bien aidée, en corrigeant un tout petit détail dans mon putting. Cela n’a pas changé grand-chose à mon jeu mais dans ma tête, ça a tout changé ! Et puis cette année, nous avions un excellent Foursome avec Lisa et Emma qui jouent souvent cette formule en Bundesliga. Et aussi parce qu’Ella, dont c’était la première participation, a très bien joué. Cette victoire au Team Shield est à ce jour mon plus beau souvenir de golf !

B. : Comment es-tu venue au golf ?

M.B. : J’ai pris mon premier club en main à l’âge de six ans en vacances à Marrakech. Je n’ai pas vraiment aimé. Mon grand-père, mon oncle et mon père jouaient depuis toujours mais je préférais le tennis. Ensuite, vers 12 ou 13 ans, j’ai commencé à assister aux entraînements juniors avec ma sœur qui a trois ans de plus que moi. Aucune de nous n’aimait vraiment le golf mais cela nous occupait le mardi et le jeudi alors que les entrainements de tennis avaient lieu le lundi, le mercredi et le vendredi. Petit à petit, j’ai remarqué que je pouvais taper la balle plutôt loin et je me suis dit que je pourrais peut-être jouer un peu plus. Mais la vraie motivation, c’est mon grand-père qui me l’a donnée.  Le golf était le seul sport que je pouvais jouer avec lui.  Il avait beaucoup joué au tennis aussi, puisqu’il a même joué la Coupe Davis, mais il était plus âgé et préférait le golf.  Quand j’ai eu mon premier index, la première chose que j’ai faite, c’est un double avec lui ! Vers 14 ou 15 ans, j’ai vraiment commencé à progresser et à baisser mon index.  On voyait que je venais du tennis et on le voit toujours.  Je ne pourrai plus changer mon swing !

B. : Que penses-tu de l’action de la Fédération Luxembourgeoise de Golf ces dernières années ?

M.B. : Je dirais que depuis cinq ans, la FLG est vraiment sur une bonne dynamique.  La première chose, c’est le partenariat noué avec notre sponsor EFG, qui nous a permis de nous équiper aux couleurs du Luxembourg, de nous entrainer lors de stages, etc. L’entrainement d’hiver aussi est vraiment important. En fait, en hiver, soit on gagne la motivation, on progresse et on devient meilleur que les autres joueurs européens, soit on perd un peu la motivation, on joue moins et on perd l’avance qu’on pouvait avoir sur les autres joueurs. Lors des entrainements de la FLG, on ne travaille pas vraiment le swing.  Il est vrai qu’on a tous la technique.  Alors, il faut faire comme aux Etats-Unis : travailler la performance et nous mettre sous pression.  Beaucoup de bons joueurs de la FLG ne savent pas jouer sous pression… On sait tous jouer à l’entrainement mais en compétition, sous pression, c’est autre chose.  Je crois que c’est un peu ce qui est arrivé aux garçons cette année lors du Team Shield. Un psychologue sportif serait peut-être une bonne idée de la part de la FLG.

B. : À ton avis, comment pourrait-on faire venir plus de femmes et de filles au golf ? M. B. : Je trouve qu’ici aux États-Unis, il y a beaucoup plus de filles qui jouent golf. Je ne connais pas vraiment la raison mais je dirais que les enfants ne pensent pas au golf quand ils choisissent un sport. Personnellement, avant de commencer le tennis, j’ai testé au moins quinze sports. Je n’aimais pas le golf parce que c’était trop technique mais j’y suis quand même revenue plus tard. C’est peut-être aussi du côté des entraineurs que ça se joue.  Il faut plus de fun. Les parents aussi ont un grand rôle à jouer.  S’ils jouent au golf, ils donnent envie à leurs enfants…

B. : Quelles sont tes ambitions? Tu voudrais devenir golfeuse professionnelle ou tu veux plutôt devenir ingénieure ?
M.B. :
Honnêtement maintenant, j’essaie de faire les deux : jouer mon meilleur golf et réussir à l’école. Vraiment j’ai des ambitions cette année avec notre équipe et j’aimerais aller jusqu’au « National ». Je trouve que pour notre école, c’est vraiment important et toute l’équipe est vraiment motivée !

B. : Merci Marie et bonne chance dans tes projets !

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